Interview de Baïdy Dieng dans le Magazine REUSSIR Juin 2010
BAIDY DIENG (ERNST&YOUNG)
«Nous participons pour crédibiliser la sélection…»
Administrateur Général Ernst&Young Conseil Sénégal, Partner Ernst& Young et Responsable des activités Conseil et du Secteur Public en Afrique francophone, Baidy Dieng (Atlantic College, 1980-1982) est surtout le Président de l'Amicale des Anciens élèves sénégalais des Collèges du Monde Uni (UWC). A ce titre, il donne un éclairage sur l'implication de l'Amicale dans le processus de sélection des futurs élèves.
Pourquoi les anciens étudiants s'impliquent dans la sélection des futurs élèves du Collège du Monde Uni ?Dans tous les pays du monde, il est fortement recommandé que les anciens élèves participent au processus de sélection car ils sont fortement imprégnés des exigences requises pour s'adapter à la vie au sein des collèges UWC. D'ailleurs, dans beaucoup de pays, la sélection est faite uniquement par les anciens élèves. Pour le cas du Sénégal, la sélection était faite au niveau du Ministère par des fonctionnaires qui, au début, ne connaissaient pas la philosophie du mouvement et donc focalisaient uniquement sur les critères académiques sans prendre en ligne de compte la personnalité et les facultés d'adaptation des candidats retenus. Les anciens élèves font aussi le lien entre les parents d'élèves pour les informations et aspects administratifs par rapport aux Collèges UWC. Comme les bourses d'études ne comprennent pas nécessairement les frais de voyage et l'argent de poche, il revient aux Anciens UWC de définir, avec les parents d'élèves, les modalités de leur contribution. Il faut comprendre que depuis 1986, ce n'est plus le Sénégal qui octroie des bourses par le canal de l'Union Européenne ou de l'ACDI, mais directement les Collèges UWC qui doivent, chaque année, chercher et trouver des donateurs (Gouvernements, Fondations, personnes privées, entreprises) pour pouvoir offrir des places à des élèves qui ne pourraient pas financer le coût de telles études.
Comment vous avez été amené à vous engager dans cette sélection ?
La participation sénégalaise a repris en 1990 sur l'initiative de Jeremy Varcoe, Directeur du Bureau International des collèges UWC de Londres, à la suite de son voyage à Dakar. Par la suite, nous avons pris contact avec les Autorités. Comme le Premier Ministre, par un de ses conseillers techniques Daniel Cabou, le Ministre de l'Education André Sonko et l'ancien Recteur de l'Université de Dakar, alors Ministre de la Justice, Seydou Madani Sy, également ancien président du Conseil de la Fondation du Baccalauréat international de Genève. A cette occasion, des organismes établis localement avaient aidé à la relance du mouvement UWC au Sénégal. On peut citer l'Ambassade de Grande-Bretagne (particulièrement l'Ambassadeur Alan Furness) et la banque CBAO, notamment son DG de l'époque Abdoul Mbaye, par un soutien matériel à l'Amicale. L'implication des Anciens élèves se fait à travers des contributions financières de la part de quelques-uns de ses membres, à présent dans la vie active. A ce sujet, notre Amicale a pu mobiliser, sur 4 ans, un montant de fonds (confiés au Collège UWC des USA qui nous garantit une place chaque année) de 60 000 $US devant servir à compléter le coût de la bourse pour la partie argent de poche et frais d'assurances à vie. Une telle somme a pu être réunie grâce aux Anciens qui ont mis entre 10 et 15 000 $US, sur 3 ans, et ces montants ont été multipliés par 2 par deux généreux donateurs (une grande banque et un généreux milliardaire), basés aux USA, et souhaitant vivement encourager une Amicale des Anciens accomplissant un travail apprécié au sein du mouvement UWC. Ce placement de fonds que nous continuons à approvisionner a été confié au Collège UWC des USA sous le nom «Amadou Cissé Endowment Fund», du nom d'un de nos brillants camarades qui, par un malheureux fait du hasard, a été victime de coups de balles au sein de son campus de l'Université de Chicago où il venait juste de finir ses études doctorales en Chimie en novembre 2007.
Ainsi depuis la fin de 1989, les offres de bourses sont notifiées à l'Amicales des Anciens qui informe officiellement le Ministre de l'Education des places disponibles et la sélection est organisée à travers les structures du Ministère (Inspections régionales d'académie, Etablissements secondaires du Sénégal du public et du privé). Le rôle des Anciens élèves est de garantir la fiabilité du processus de sélection et veiller à ce que les critères définis par le mouvement des UWC soient pris en compte. Il est plus aisé pour une personne y ayant vécu 2 années d'en percevoir l'esprit et la philosophie. Le rôle du Ministère de l'Education est d'apporter son autorité de tutelle, fournir le cadre institutionnel nécessaire qui permet de sélectionner des élèves sénégalais sur la base des critères établis et sécuriser un processus, engagé à l'échelon national. Cela fait 20 ans que ça marche parfaitement et c'est un bel exemple de coopération entre le Public (Ministère de l'Education) et le Privé (Amicales des Anciens UWC) où chacun des acteurs joue pleinement son rôle pour que de jeunes sénégalais – sur le critère unique du mérite - à travers le territoire national puissent avoir la chance de vivre une expérience unique d'ordre académique et humaine.
Comment se passe le processus de sélection ?
La sélection se fait en deux phases. D'abord, les établissements sont informés, par note du Ministère, à travers les Inspections d'Académie. Et charge, pour les établissements, de proposer leurs meilleurs candidats pour la sélection qui commence chaque année au début du mois d'avril sur la base du dossier scolaire des candidats de la classe de 6ème aux notes du 1ersemestre de la classe de seconde scientifique. Ensuite, une fois que les dossiers scolaires sont examinés (en général 50 à 70), il est retenu une liste d'environ 20 candidats qui vont passer l'épreuve déterminante de l'entretien de culture générale et de personnalité. Une épreuve qui permet, après délibération du jury (de 8 à 10 membres), de classer et de retenir les élèves lauréats en fonction des places et bourses d'études accordées. Puis, troisième étape, c'est l'acceptation par les collèges UWC du dossier final des candidats retenus. Ce n'est qu'après ce stade que les résultats sont officiellement proclamés.
Quels conseils donnez-vous aux parents et élèves qui veulent intégrer cette école d'excellence ?
Il est important, pour tout parent d'élève, surtout pour tout élève, désirant aller dans un collège du Monde Uni de bien se renseigner sur le contenu des programmes académiques, de la philosophie du mouvement et surtout mener une réflexion sur les choix des filières universitaires après le Bac international. Ce point me paraît essentiel car l'obtention de ce Bac (ou celui sénégalais) n'est pas une fin en soi. Autant il est difficile, pour un élève de 16 à 18 ans d'avoir une idée précise sur ses choix universitaires et de carrière professionnelle, autant cette réflexion doit être engagée par les parents d'élèves dont le rôle est de guider leurs enfants dans ce choix et d'essayer, dans la mesure du possible, de se renseigner et de discuter des choix d'orientation et d'opportunités universitaires et professionnelles qui s'offrent aux jeunes élèves qui, bien souvent, paraissent bien désarmés face à ces choix cruciaux.
Le Bac international est une excellente passerelle pour les universités américaines et l'enseignement anglo-saxon. Il reste de qualité pour le système universitaire français type Grande Ecole mais il nécessite une réadaptation pédagogique ardue en mathématiques, le système d'enseignement des maths étant très différent, pour les élèves souhaitant entrer dans les toutes meilleures écoles d'ingénieurs françaises.